Ripley : Artiste et irréprochable | Ingérence

Ripley : Artiste et irréprochable | Ingérence
Ripley : Artiste et irréprochable | Ingérence
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La série Ripley (Steve Zaillian, 2024), récemment sorti sur Netflix, nous montre un être bien différent des précédentes adaptations du personnage incarné par Patricia Highsmith. Par exemple, Denis Hopper (L’ami américainde Wim Wenders, 1977) incarnait un Ripley plus âgé, accablé par quelque chose qui ressemble à une angoisse existentielle après des années de vie sans vivre et d’être sans être.

Pendant ce temps, Ripley de Matt Damon (Le talentueux M. Ripley, d’Anthony Minguella, 1999) imposait un charme et une vitalité qui enveloppaient la minutie d’une machine… qui à son tour finissait par révéler une monstruosité moderne et vide ; tandis que Ripley d’Alain Delon (En plein soleil, de René Clément, 1960) était beau et séduisant comme Satan.

Une telle diversité d’interprétations d’un même personnage représente les réponses possibles à la grande question posée par son auteur lors de la création de Tom Ripley, un escroc et faussaire dont le métier est de ne pas être pour devenir un autre, et finalement disparaître.

Dans ces conditions, il est frappant de constater que Tom Ripley, interprété par l’acteur irlandais Andrew Scott, emprunte des chemins différents et utilise d’autres ressources. Ce Ripley ne déborde pas de charme, mais semble plutôt l’utiliser de manière très sélective ; Cela ne génère pas de confiance mais plutôt l’étrangeté et la curiosité nécessaires pour qu’ils ne veuillent pas s’en débarrasser ; Il n’impose pas de personnalité donnée, mais son visage est comme celui d’une poupée dont le ventriloque s’est enfui vers un lieu inconnu.

Ce Ripley est véritablement une énigme : pas de vie passée, hormis quelques mentions de la tante qui l’a élevé, et une enfance qui a été un malheur pour tous deux ; sans but, sauf pour réaliser les escroqueries qui le maintiennent en vie pour… on ne sait pourquoi, puisque la vie de Ripley à New York n’envisage aucun amusement ou plaisir qui justifierait son obstination à résider sur terre.

Ce mode de vie léthargique et monastique est interrompu par M. Greenleaf (Kenneth Lonergan), un constructeur de bateaux millionnaire qui lui charge de contacter son fils Richard (Johnny Flynn) dans une petite station balnéaire près de Naples… et de le ramener.

Sa vie à New York et le long voyage en Italie qu’elle entamera après sa rencontre avec Richard et son amie Marge (Dakota Fanning), sont peints dans un noir et blanc impeccable, ce qui donne une certaine intemporalité à cette histoire qui se déroule au début des années 1990. 60 et évite en même temps le drame des grands contrastes, puisque ses objectifs sont différents.

Ce Ripley est véritablement une énigme : pas de vie passée, hormis quelques mentions de la tante qui l’a élevé, et une enfance qui a été un malheur pour tous deux ; sans but, sauf pour réaliser les escroqueries qui le maintiennent en vie pour… on ne sait pourquoi, puisque la vie de Ripley à New York n’envisage aucun amusement ou plaisir qui justifierait son obstination à résider sur terre.

Le premier est de suggérer la propreté d’un laboratoire, où Tom Ripley est observé comme s’il était un cobaye montant et descendant des escaliers qui, dans la géométrie de fer de l’architecture italienne, fonctionnent comme une série de labyrinthes tridimensionnels. Le cobaye n’arrête pas de bouger et à travers ses mouvements nous croyons comprendre à propos de Ripley ce qu’une voix off inexistante pourrait expliquer en moins de temps. En d’autres termes, il n’y a aucun psychologisme derrière Ripley ou ses actions, seulement un mouvement perpétuel comparable à celui des zombies ou des vampires. Oui, Ripley est aussi un mort-vivant.

Le deuxième objectif du noir et blanc est de placer l’ensemble de l’intrigue dans un décor « artistique », pour ainsi dire, qui magnifie l’effet esthétique des peintures, des statues et des sculptures, faisant de l’Italie un musée invasif, généreux en détails et en leitmotivs visuels qui donner plus de rythme au récit et aussi un peu d’humour.

Pourtant, le grand musée dans lequel Ripley réside est là pour rendre plus cohérent le spectacle qui s’offre réellement à nous, qui n’est autre que la naissance d’un artiste (même si c’est par tromperie). Ce n’est pas pour rien qu’on cite constamment le Caravage dont le protagoniste devient obsédé et qu’il commence à imiter ; Ce n’est pas en vain que l’on a choisi précisément ce peintre baroque, dont les toiles sombres émergent des figures sculptées par la lumière.

Cela pourrait ressembler à une arabesque gratuite de la série, si ce n’était du fait inquiétant que les sympathies du spectateur vont à Ripley. Contre tout bon sens. Ce n’est pas un personnage vertueux, charismatique, attrayant ou innocent. Au contraire, c’est un parasite capable de meurtre, et dont la capacité à se faufiler suscite d’abord un certain intérêt, puis une admiration construite par le scénario et la cinématographie.

En d’autres termes, la série nous inocule, en tant que spectateurs, une dose de ce que l’on appelle le « pardon social », la propension des gens à pardonner, minimiser ou ignorer les méfaits de ces artistes et athlètes.artistes interprètes ou exécutants, dirait-on en anglais) pour qui on éprouve une gratitude particulière. Comme cela s’est produit avec OJ Simpson, récemment décédé, avec Héctor « le Bambino » Veira, avec Plácido Domingo et, pourquoi pas, avec Caravaggio lui-même.

La moralité anormale de cette série repose sur la brève apparition de Reeves Minot (John Malkovich), un collègue plus âgé de Ripley et une projection évidente de ce que sera l’avenir du protagoniste dans les décennies à venir. Cependant, la fonction de Minot est de verbaliser le mépris pour les privilégiés oisifs et sans talent sur lesquels Ripley a dû garder le silence pour remplir sa mission, et ce faisant, blanchir leur mode de vie douteux avec une question assez simple : qu’est-ce qui ne va pas avec être un parasite des parasites ?

Avec toute une construction mise au service d’une vision favorable de Ripley, la série se clôt sur un dernier tour. Un peu banal, peut-être, avec un montage accéléré de flashbacks qui remet en question une partie de ce que l’on a vu et nous convainc que le protagoniste n’est pas seulement un escroc, un meurtrier et un artiste, mais aussi un magicien. Ou plutôt un illusionniste qui nous a montré quelque chose de différent de la réalité. Et ce faisant, il nous a laissé le désir (commercialement sain) d’en apprendre davantage sur sa vie et son travail.

À propos de

Titre original: Ripley

Pays: ETATS-UNIS

Exposition: Mini-série de huit épisodes (2024)

Créé par:Steve Zaillian

On peut le voir dans:Netflix

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