Foire du livre qui ne vieillit pas

Foire du livre qui ne vieillit pas
Foire du livre qui ne vieillit pas
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La Foire du livre de Bogotá s’est terminée la semaine dernière. J’ai lu deux versions contradictoires. On dit que pour entrer dans la salle, il fallait attendre dans des files interminables et que l’on remarquait la publicité excessive des maisons d’édition pour vendre. Un autre dit que Filbo est le plus grand spectacle au monde. Et les foires de Francfort et de Guadalajara au Mexique, rien à voir ? Le désir de vendre pour consommer, quel que soit le mérite du livre devenu objet, préoccupe de nombreux lecteurs, parmi lesquels je me compte.

Mais il est permis de rêver d’un salon du livre sans nouveauté apparente. Ceux qui sont essentiels. Dans la sphère latino-américaine, il existe des livres d’auteurs qui ne perdent pas leur validité. J’en choisis quelques-uns sans intention de faire un cours magistral et avec le poids du goût, qui est subjectif : Pedro Paramo de Juan Rulfo est un récit, sinon le meilleur, du moins l’un des meilleurs sur le monde rural latino-américain et son réalisme magique avant l’invention de l’expression. A ses côtés se trouve La mort d’Artémio Cruz de Carlos Fuentes, qui est sans aucun doute l’histoire sombre de la révolution mexicaine racontée à partir de l’agonie d’un révolutionnaire. La définition la plus précise de ce qu’est notre pays, oui le nôtre, vient de l’Argentin Jorge Luis Borges dans Le livre de sable lorsque dans l’une de ses histoires, dans laquelle il était professeur, il met dans la bouche d’un professeur colombien fictif une réponse inédite à la question que lui pose Ulrica : « qu’est-ce qu’être Colombien ? “Je ne sais pas,” répondis-je. C’est un acte de foi. Il n’existe aucun manuel d’histoire qui le dise en termes aussi courts. Avec une précision et une rapidité impressionnantes également. Le chilien Roberto Bolaño a écrit un roman à la fin du siècle dernier Les détectives sauvages, qui n’est pas considéré comme faisant partie du canon du « boom littéraire » latino-américain mais devrait l’être pour son style franchement avant-gardiste et son réalisme viscéral comme Bolaño lui-même l’appelait à travers ses personnages. Comment lâcher prise Marelle de Julio Cortázar, un roman qui a marqué l’identité de ceux d’entre nous qui, étudiant en Europe, avons dû le chercher pour ne pas être laissés pour compte ? Dans le genre des biographies, celle de Jacob Beard le messager de Fernando Vallejo n’a pas d’égal car il est bien documenté et mieux écrit.

Cependant, la réédition par Editorial Planeta de Le Maelström de José Eustasio Rivera, à l’occasion du centenaire de sa publication en 1924, méritait une digne célébration à Filbo. Un chef-d’œuvre de la littérature colombienne, un livre centenaire dans des habits neufs. Ne pourrait-on pas inventer une foire aux livres qui ne sont pas nouveaux mais auxquels il faut revenir sans s’arrêter parce qu’ils ne vieillissent pas ?

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